23 KILOMÈTRES D'ARCHITECTURE
Notre projet s’intègre dans le territoire picard qui s’apprête à connaître un grand bouleversement, puisque d’ici 2023 la création d’un canal à grand gabarit, le Canal Seine-Nord- Europe, va le traverser du Nord au Sud pour compléter le réseau fluvial reliant le Havre et la Seine aux grands ports du Nord de l’Europe. Derrière de nombreux avantages économique et écologique liés au développement du transport fluviale français, ce sont les zones d’ombres du projet du Canal Seine Nord Europe qui ont été pour nous moteur de projet.
En effet, le nouveau canal vient s’implanter en parallèle et à quelques centaines de mètres de l’axe fluvial existant qu’est le Canal du Nord dont le gabarit est sous-dimensionné. Ce dernier, incapable de concurrencer le nouveau trafic, deviendra obsolète. C’est un tronçon de 23km, à la jonction entre l’Oise et la Somme, qui est en péril puisque, totalement artificiel, il est réalimenté toutes les nuits par pompage au niveau des écluses pour palier au dénivelé du terrain. Pour des raisons de rentabilité, il ne sera pas maintenu en eau, devenant une véritable tranchée dans le paysage, un égout à ciel ouvert. Ainsi, plusieurs questionnements ont guidés notre démarche : comment revitaliser un territoire à travers le recyclage d’une infrastructure devenue obsolète ? Et par ce biais comment mettre en valeur un ouvrage de génie civil jusqu’ici sous les eaux ?
Avant tout, nous refusons la mort du Canal du Nord et considérons son assèchement comme une opportunité rare et singulière. Ce canal devient alors un incubateur de possibilité pour le territoire qu’il traverse. Pour transformer cette tranchée en atout nous cherchons d’une part à nous intégrer dans le tissu d’activité de la région à travers la création d’une vallée des possibles et d’autres part à nous fondre dans le paysage et la topographie du territoire en utilisant le lit du canal comme sols et murs.
L’abandon de cet ouvrage de génie civil représente pour nous un réel gaspillage d’énergies et de matériaux. Cet investissement colossal du siècle dernier se doit de durer dans le temps en retrouvant une nouvelle utilité. L’infrastructure en tant que telle forme une tranchée de 35,5m de large en surface et se réduit à 22m au fond, sur une profondeur de 4,5m. Le revêtement en béton est d’une épaisseur moyenne de 20cm. En plus de la cuve notre tronçon de 23km est constitué de 5 écluses et d’un souterrain de 1km de long.